Blanchis et Noirs à la fois July 20, 2012

par Aya Touré
initialement pour un cours au Collège Marianopolis,
Canada
2012

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Introduction : ailleurs, l’herbe est toujours plus verte…
Il est ironique de constater à quel point les personnes à la peau claire désirent avoir une peau bronzée. Ceci est considéré comme un signe de bonne santé et de richesse. Être bronzé toute l’année montre que l’individu a les moyens de voyager – ou de fréquenter des salons de beauté – pour obtenir la couleur de peau souhaitée. Toutefois, la peau claire est également associée à la richesse et à la prospérité. Les personnes à la peau foncée désirent parfois avoir une peau plus claire, dans la mesure où cela leur offrirait de plus grandes chances de réussite dans la vie. Comme on le voit, « l’herbe semble toujours plus verte de l’autre côté de la barrière ».KIRENE
      Le blanchiment de la peau a été pratiqué pendant longtemps par des personnes à la peau foncée à travers le monde. Certains affirment que cela est lié à des aspects de l’histoire, comme le colonialisme et l’esclavage. De nos jours cependant, nous sommes conditionnés par les médias. Nous sommes amenés à croire que la peau claire est belle et promet le succès. Cet exposé traite des raisons pour lesquelles certaines femmes, en particulier celles à la peau foncée, ont tendance à se blanchir la peau. Il y a deux hypothèses. D’abord que l’histoire (l’esclavage et le colonialisme) a un rôle important à jouer dans les motifs du blanchiment de la peau. Et en second lieu, que les médias ont un grand rôle à jouer. À la fin du document, le lecteur aura une bonne idée de ce qui motive les gens à se blanchir la peau malgré tous les dangers liés à cette pratique.

La recherche et des concepts pertinents en psychologie et sociologie
Plusieurs travaux de recherche ont été menés sur la question du blanchiment de la peau. Une importante étude sur la psychologie des enfants mérite notre attention. Cette étude a consisté à exposer des enfants à la peau blanche et des enfants à la peau noire à des poupées de couleur blanche et noire. Ils ont ensuite été interrogés sur leur poupée préférée. De nombreux enfants à la peau noire ont montré leur préférence pour la poupée de couleur blanche (Charles, 2003) ; les enfants blancs ont fait pareil. Cela indique à quel point, depuis l’enfance, nous sommes conditionnés à avoir des préférences pour la peau claire ou blanche.
      Nous pensons souvent que seules des personnes à la peau noire pratiquent le blanchiment de la peau. Cependant de nombreux articles mentionnent les Asiatiques, les Indiens et les Mexicains (Nakano, 2008) comme ayant également recours à cette pratique. Le blanchiment de la peau est un phénomène mondial. Une peau claire a tendance à être liée à des chances élevées d’embauche professionnelle ; elle semble également être associée à une meilleure santé, la jeunesse, et l’attractivité du visage (Swami, Furnham & Joshi, 2008). Un argument répandu dans la littérature scientifique met en avant le rôle des médias. De nombreux articles font valoir que les médias de masse répandent l’idée selon laquelle une peau claire serait synonyme de beauté et de succès, ce qui pourrait être une des raisons qui pousse les gens à se blanchir la peau. Un autre argument développé par des chercheurs est que les femmes se blanchissent la peau à cause du colorisme (en rapport avec l’histoire des Noirs), ce qui pourrait contribuer à une faible estime de soi (Thompson & Keith, 2001). Le colorisme se réfère au fait que les gens sont victimes de discrimination en fonction de leur couleur de peau. Selon cet argument, les personnes qui ont une certaine couleur de peau auraient de meilleures chances de réussite (possibilités d’emploi, statut économique) que d’autres personnes (Hunter, 2002).
      Même si la recherche sur ce sujet est incomplète, ce document s’appuiera sur les travaux de plusieurs chercheurs qui ont étudié les raisons qui incitent les gens à se blanchir la peau. Nous aurons recours à des notions de psychologie et sociologie. Ces deux disciplines étant très étroitement liées, les concepts utilisés vont nécessairement se recouvrir.
      L’estime de soi, l’identité et l’attractivité sont des concepts pertinents pour explorer ce thème du blanchiment de la peau. Ainsi que le genre, parce que le blanchiment de la peau concerne plus les femmes que les hommes. Les femmes, sans distinction de classe sociale, ressentent la nécessité de répondre à certaines normes de beauté afin de trouver de « bons » compagnons par exemple.

Histoire et progression du blanchiment de la peau
Beaucoup de gens, dans le monde entier, se blanchissent la peau pour obtenir un teint plus clair. Le but de cet article est d’essayer de comprendre pourquoi ils ont recours à cette pratique, et pourquoi la peau claire est si souvent liée au (à la perception / réalité de) privilège. Un point sur lequel les chercheurs s’accordent est que le blanchiment de la peau est probablement la conséquence de l’histoire (Verma, 2010). L’esclavage, ainsi que le colonialisme en Afrique, ont certainement amené les individus à la peau foncée à croire qu’ils étaient inférieurs et donc, il est compréhensible que certaines personnes se blanchissent aujourd’hui la peau pour essayer d’atteindre le statut associé à la peau claire et avoir de meilleures chances et d’options de réussite dans la vie.
      Verma (2010) avance l’argument que ce phénomène puise ses racines dans le système des castes qui place les personnes de peau claire en haut de l’échelle sociale et les personnes de peau foncée en bas de l’échelle sociale. De nombreux autres articles mentionnent l’esclavage comme une des raisons pour laquelle la peau claire est perçue comme supérieure et associée à une plus haute classe socio-économique, mais Hunter (2002) donne plus de détails dans son texte sur les causes. Elle affirme que les propriétaires d’esclaves séparaient ceux-ci en fonction de leur couleur de peau dans le but de créer des conflits et de les mettre en concurrence, ce qui permettait de réduire les révoltes contre les Blancs. Les colonisateurs espagnols ont fait la même chose dans le Mexique colonial en divisant les Mexicains suivant leur couleur de peau. Les Espagnols ont ainsi favorisé les Mexicains à peau claire, les autres se retrouvant en bas de l’échelle sociale. L’idée de permettre l’ascension sociale de ceux qui leur ressemblaient a aidé les Espagnols à maintenir leur pouvoir (Hunter, 2002).
      Toujours selon Hunter (2002), les personnes qui ont une peau plus claire ont plus de chances en matière de niveau de scolarité, de revenu et de statut du conjoint. Aux États-Unis, un traitement préférentiel a été accordé aux personnes à peau claire (mulâtres) par la majorité blanche et aussi par des personnes noires dans les années 1900. Cela montre à quel point même les Noirs ont, en quelque sorte, rejeté leur propre identité. Une anecdote intéressante rapportée par de nombreux articles relate que dans le but de faire partie d’un club, les Noirs ne devaient pas être plus foncés qu’un sac de papier brun (Hill, 2002).
      Parce que la peau claire est associée à un statut plus élevé, plus de privilège et de beauté, les femmes ressentent le besoin de se blanchir la peau pour être belle et attirer des compagnons de statut élevé (Fokuo, 2009). Même les femmes asiatiques ayant un teint clair chercheront à accroître la clarté de leur peau. Les chercheurs (del Giudice & Yves, 2002: 69) pensent qu’au Sénégal, 36% des femmes pratiquent le blanchiment de la peau, connu populairement sous l’appellation « xessal ». Toutefois, des discussions informelles, à travers ma famille et mes amis, avec des hommes et femmes sénégalais suggèrent que le pourcentage pourrait être encore plus élevé. Au Ghana, on raconte que le blanchiment de la peau était initialement pratiqué par des prostituées, après la seconde guerre mondiale, dans le but d’attirer des clients européens. Puis la peau claire s’est imposée comme une tendance, puis une norme de beauté. Elle s’est propagée à toutes les classes de la société et aussi à tous les sexes (Fokuo, 2009). On parle souvent des hommes « sapeurs » au Congo qui se seraient blanchi la peau.
      Les femmes et les hommes ont toujours eu des positions différentes, et souvent inégales dans la société ; cette inégalité est également exprimée dans le domaine du blanchiment de la peau. Comme plusieurs articles le soulignent, même si le blanchiment de la peau est pratiqué par les deux sexes, les femmes y ont plus recours que les hommes. Avoir une peau sombre, plutôt que claire, affecte les hommes et les femmes de manière très différente. Les hommes ayant un teint clair plutôt qu’un teint sombre ont une plus grande auto-efficacité (la confiance qu’ils placent en leurs compétences) ; pour les femmes cependant, l’auto-efficacité ne change pas avec la couleur de peau. Par contre, les femmes ayant un teint clair plutôt que sombre ont une plus grande estime d’elles-mêmes, et cela ne change pas pour les hommes. Ainsi la couleur de peau est un élément déterminant de l’estime de soi pour les femmes et d’auto-efficacité pour les hommes (Thompson & Keith, 2001). En d’autres termes, la couleur de peau touche les hommes plus à l’extérieur, et les femmes à l’intérieur. Les hommes et femmes peuvent être à la fois positivement ou négativement influencés par la couleur de peau, mais de différentes manières. Selon Thompson et Keith, les effets d’une peau plus sombre sont plus dévastateurs pour les femmes que pour les hommes parce qu’ils entraînent des attitudes et une perception négative de soi-même.
      De la naissance à l’âge adulte, en passant par l’enfance puis l’adolescence, les femmes se voient rappeler que la peau sombre n’est pas bonne, ce qui peut avoir un effet considérable sur l’estime d’elles-mêmes. Un documentaire intitulé Dark Girls que j’ai vu au sujet des femmes qui expliquent leurs expériences en tant que femmes à la peau noire était très frappant. Beaucoup d’entre elles ont affirmé que, quand elles étaient engagées dans une relation, leur compagnon ne les emmenait jamais en public ; tout était fait derrière des portes closes. Cela en soi est susceptible de montrer ce que les hommes pensent des femmes à la peau foncée. Il n’est donc pas surprenant que cela puisse affecter l’identité des femmes.
      Les explications ci-dessus permettront de comprendre pourquoi les femmes ressentent le besoin de blanchir leur peau pour obtenir un teint clair. L’association entre la peau claire et un statut plus élevé, un niveau d’éducation supérieur et d’autres aspects positifs est encore vraie dans beaucoup de sociétés aujourd’hui. Des vidéos sur le blanchiment de la peau décrivent des mères ou des grand-mères racontant à leurs enfants qu’ils sont trop sombres, et qu’ils devraient s’éclaircir leur peau. Les personnes à la peau foncée sont engagées dans un cercle vicieux qui encourage un sentiment d’inadéquation ou d’infériorité. Si les parents se réfèrent à leurs enfants comme étant trop noirs, les enfants auront à leur tour tendance à continuer dans cette voie avec leurs enfants et petits-enfants – parce qu’ils auront intériorisé la croyance selon laquelle la peau claire est meilleure. Cette tendance se perpétue aussi dans la mesure où les hommes ont été conditionnés à préférer les femmes à la peau claire.

Promotion médiatique du blanchiment de la peau
De nombreux auteurs conviennent que les médias de masse ont un impact énorme sur l’incitation au blanchiment de la peau. Les entreprises manipulent le public grâce à la publicité, faisant croire aux gens qu’avec la peau claire, ils ont plus de chances de réussir (Verma, 2010). La mise en avant des « bons » côtés du blanchiment de la peau, tout en occultant la partie dangereuse, influe sur les actions des gens. En fait, le blanchiment de la peau peut être très dangereux pour le bien-être. L’application continue de crèmes pour se blanchir la peau peut provoquer des cancers de la peau ou l’acné, ou conduire à la perte de l’élasticité de la peau, ce qui entraîne une peau avec plus de rides (Charles, 2003 ; Fokuo, 2009). La peau peut aussi dégager de désagréables odeurs après de nombreuses années d’utilisation de crèmes éclaircissantes.
      Le monde de la musique associe la peau claire à un statut élevé et à la confiance en soi (Fokuo, 2009). Prenez le riche et célèbre Michael Jackson, par exemple, qui a blanchi sa peau, ou des chanteuses maliennes qui pratiquent le blanchiment de la peau et qui paraissent à la télévision pour être vues et imitées.
      Comme Thompson et Keith (2001: 339) le disent : « Les médias ont encouragé une perception négative des femmes à la peau noire ». Les femmes qui ont la peau foncée ont tendance à avoir moins d’estime d’elles-mêmes, donc elles blanchissent leur peau pour se sentir plus belles, ce qui augmente leur estime de soi (Fokuo, 2009).       De nombreux artistes, chanteurs ont blanchi leur peau, influençant ainsi leur public à faire de même. Ces personnalités, que ce soit à Hollywood ou en Afrique de l’Ouest ou ailleurs, ont une influence significative sur les gens. Beaucoup de sociétés composées de personnes à la peau foncée ont développé un désir pour un teint clair, et donc de nombreuses sociétés en Afrique, en Asie et dans les Amériques encouragent le blanchiment de la peau.
      Dans les médias, les personnes à la peau foncée sont sous-représentées dans les supports papiers et dans les programmes de télévision. Et quand les gens de couleur sont présents, ils sont représentés avec les caractéristiques physiques de l’Occident. « Pour être définies par la société américaine comme étant belles, la plupart des femmes doivent avoir la peau claire et des traits de visage européens, en particulier les femmes de couleur » (Hunter, 2002: 178). Ainsi, les femmes dont les images sont véhiculées dans les médias et qui sont considérés comme belles ont tendance à être de peau blanche, à avoir des yeux clairs, de longs cheveux, et un nez long et mince.
      J’ai vécu au Mali et au Sénégal en Afrique de l’Ouest et j’y ai remarqué que les affiches publicitaires et les panneaux d’affichage représentent les enfants, les hommes et les femmes avec un teint clair. Les populations d’Afrique de l’Ouest sont très variées, mais les personnes ayant un teint foncé sont rarement représentées sur les affichages publicitaires. Il ne s’agit pas dans ce cas de médias occidentaux. Ces affiches publicitaires ciblent un public ouest-africain et sont créées en grande partie par des Ouest-africains. Encore une fois, cela montre que même les sociétés composées de peuples noirs ont ou font la promotion de la conviction selon laquelle : « une peau plus claire, c’est mieux ». J’ai même entendu dire qu’au marché de Bamako, la capitale du Mali, quand une femme à la peau très foncée passe, quelqu’un pourrait lui dire, « Tu ne veux pas te rincer un peu ? ».
      Des spots publicitaires à la télévision et les spectacles qui représentent les femmes maliennes ne mettent pas non plus en avant les femmes ayant une peau foncée. La télévision diffuse des publicités pour crèmes éclaircissantes qui montrent des femmes à la peau claire. Lorsque les hommes voient ces spots publicitaires, ils souhaitent probablement avoir à leur côté une femme au teint clair, comme celles des images diffusées à la télévision. Et quand les femmes voient cela, elles souhaitent avoir ce teint clair, car cela est perçu comme étant un critère de beauté. Même les « griottes », ou chanteuses traditionnelles, qui passent à la télévision, blanchissent leur peau. Donc, on pourrait dire que les messages passent directement de l’écran du téléviseur au sein des villages où les femmes paient 5 ou 10 dollars pour des crèmes éclaircissantes (et dangereuses).
      Bien que les raisons qui motivent le blanchiment de la peau puissent trouver ses racines dans les privilèges établis depuis le colonialisme, les mêmes hiérarchies d’accès à la richesse et au statut social sont renforcées aujourd’hui par la publicité et les médias, même dans les localités où les populations ont majoritairement une peau foncée. Cela soulève la question des actions à entreprendre pour briser les hiérarchies monotones de pouvoir et de statut social, qui font la promotion d’une seule « couleur », de sorte que la véritable beauté et la force de la diversité puissent régner.

Conclusion
L’histoire et les médias de masse semblent être les raisons principales du blanchiment de la peau dans notre société d’aujourd’hui ; la recherche a ainsi confirmé les deux hypothèses. La colonisation et l’esclavage ont très durement touché l’humanité, et leur influence est encore très répandue. Les médias ont toutefois l’influence la plus importante aujourd’hui à cause des images qui dépeignent la beauté.

Bibliographie
Charles, C.A.D. 2003. “Skin Bleaching, Self Hate and Black Identity in Jamaica.” Journal
       of Black Studies
, 33(6): 711-728.
Cet article porte sur les jamaïcains. Il affirme que les raisons pour lesquelles ils se blanchissent la peau relèvent des effets de l’esclavage. Il se concentre également sur l’estime de soi, pour constater que la haine de soi et une faible estime de soi n’ont rien à avoir avec le fait que les gens se blanchissent la peau. Ils ont ensuite émis l’hypothèse que la pression des camarades peut être une raison pour certaines personnes. Ils ont également mis un accent important sur les médias et ce qui est y dépeint.

del Giudice, P., et Yves, P. 2002. "The Widespread Use of Skin Lightening Creams in
       Senegal: A Persistent Public Health Problem in West Africa.” International Journal of
       Dermatology
, 41(2): 69–72.
Dans cet article, les chercheurs partagent les résultats d’une étude faite en 1992-93 portant sur 684 femmes à Dakar, au Sénégal. Parmi elles, 36% ont dit qu’elles avaient utilisé des crèmes pour s’éclaircir la peau au moins une fois. La durée moyenne d’utilisation était de quatre ans. Les produits couramment utilisés étaient l’hydroquinone et des corticoïdes mais 25% des femmes avaient utilisé des produits de composition inconnue. Des détergents, du sodium hypochlorite, du jus de citron, de l’acide salicylique, et peut-être des mercuriels ont également été utilisés. Et 62,5% des femmes qui avaient utilisé les crèmes avaient connu au moins un effet indésirable tel que l’acné du visage, l’atrophie, une hypertrichose, ou les vergetures. Bien que le blanchiment de la peau soit une pratique cachée, l’étude a pu confirmer l’utilisation « extensive et incontrôlée d’agents de blanchiment dans la population féminine africaine. »

Fokuo, J.K. 2009. “The Lighter Side of Marriage: Skin Bleaching in Post-Colonial Ghana.”
      African and Asian Studies, 8(1/2): 125-146.
Cette étude se concentre sur les femmes ghanéennes et les raisons pour lesquelles elles blanchissent leur peau, même si elles sont satisfaites de leur teint. Comme d’autres articles, celui-ci mentionne le mariage. Il est intéressant parce qu’il aborde les motivations des femmes pour le blanchiment de leur peau.

Goldsmith, A.H., Hamilton, D., et Darity, W. 2006. “Shades of Discrimination: Skin Tone and
       Wages.” The American Economic Review, 96(2): 242-245.
Cette étude fait le lien et compare la race / couleur de la peau et les inégalités aux États-Unis. Elle rappelle des événements historiques tels que le mouvement des droits civiques. Les chercheurs ont constaté que la couleur de peau avait un effet sur les salaires (dans les années 1990), ce qui aurait pu inciter un grand nombre de personnes de peau foncée à se blanchir la peau. Les chercheurs concluent que pour les salaires, il y avait un avantage à avoir la peau claire.

Hall, R. 1995. “The Bleaching Syndrome: African Americans’ Response to Cultural Domination
       vis-a-vis Skin Color.” Journal of Black Studies, 26(2): 172-184.
Cette étude explique pourquoi certaines personnes se blanchissent la peau et les conséquences qui en résultent. Il se concentre sur les Afro-Américains vivant aux États-Unis. Les chercheurs affirment que les gens se blanchissent la peau afin de mieux s’intégrer à la culture dominante.

Hill, M.E. 2002. “Skin Color and the Perception of Attractiveness among African Americans:
       Does Gender Make a Difference?” Social Psychology Quarterly, 65(1): 77-91.
Cette étude se concentre sur les Afro-Américains. Il conclut que les femmes plus que les hommes sont considérées comme attrayantes ou non en fonction de leur couleur de peau.

Hunter, M.L. 2002. “‘If You’re Light You’re Alright’: Light Skin Color as Social Capital for
       Women of Color.” Gender and Society, 16(2): 175-193.
Cet article, en utilisant des perspectives sociologiques, essaie de lier la couleur de la peau des Afro-Américains et des Américains d’origine mexicaine aux chances de réussite dans la vie. Les conclusions de l’étude révèlent que la peau plus claire est en fait liée à plus de privilèges, en ce qui concerne le niveau de scolarité, le revenu et le statut du conjoint.

Jones, C.B., Davis, R., Harris, A., Bennett, B. J., Brown, K., Wood, P., Jones, D.R., Specer, 
      S., Nelson, L., Brown, J., et Waddell, T. 2003. “Rating by Black Male College Students
       of Female Attractiveness Based Upon Skin Color.” Negro Educational Review, 54(3/4): 111-113.
Dans cette étude, des étudiants noirs de sexe masculin sont invités à apprécier et « noter » les femmes noires. La couleur de peau apparemment joue un rôle dans l’attrait qu’ils trouvent aux femmes. Mais d’autres caractéristiques physiques et psychologiques entrent en jeu dans leur jugement. L’étude souligne ainsi d’autres facteurs qui contribuent à considérer une femme comme attrayante ou non, et conclut que la couleur de peau n’est pas la seule variable.

Nakano, E.G. 2008. “Yearning for Lightness: Transnational Market in the Marketing and
       Consumption of Skin Lighteners.” Gender and Society, 22(281): 281-301.
Cet article discute de l’énorme rôle que les grandes entreprises ont sur les médias de masse, et la grande influence des médias sur le public. Les auteurs font valoir que les grandes et petites entreprises manipulent les gens afin de les inciter à acheter leurs produits.

Swami, V., Furnham, A., et Joshi, K. 2008. “The Influence of Skin Tone, Hair Length, and
       Hair Colour on Ratings of Women’s Physical Attractiveness, Health and Fertility.”
       Scandinavian Journal of Psychology
, 49(5): 429-437.
Cet article résume une étude visant à comprendre comment les gens relient la couleur de peau, ainsi que la longueur et le couleur des cheveux des femmes, à la santé, la fertilité et l’attractivité. Le teint est corrélé à la manière dont l’attrait d’une femme est perçu ; mais il y a également des liens avec la santé et la fertilité. L’étude a indiqué que les femmes à la peau claire, avec de longs cheveux bruns plutôt que blonds, ont été perçues comme plus attrayantes. En ce qui concerne les évaluations de santé, les femmes à peau foncée avec des cheveux bruns ont été évaluées de façon plus positive. Les femmes brunes ont été jugées plus fertiles que les blondes, et les femmes à la peau foncée ont été évaluées de façon plus positive en matière de fertilité.

Thompson, M.S., et Keith, V.M. 2001. “The Blacker the Berry: Gender, Skin Tone,
       Self-Esteem, and Self-Efficacy.” Gender and Society, 15(3): 336-357.
Cet article relie le blanchiment de la peau à la psychologie. Il se réfère à l’estime de soi et à l’auto-efficacité et comment celles-ci fonctionnent différemment chez les hommes et les femmes. Il affirme que la couleur de peau est plus importante pour les femmes que pour les hommes. Et il compare l’estime de soi des femmes de classe moyenne avec celle des femmes issues d’une classe supérieure. Les chercheurs ont constaté que le teint est lié à l’auto-efficacité. Quand le teint s’éclaircit, l’auto-efficacité s’accroit. Cette corrélation est beaucoup plus forte pour les hommes que pour les femmes ; les femmes n’ont pas autant d’augmentation de leur auto-efficacité lorsque leur teint s’éclaircit. Les chercheurs ont également examiné l’estime de soi pour les hommes et les femmes : l’estime de soi des hommes ne change pas s’ils ont un teint de peau plus clair ; les femmes affichent cependant une plus grande estime d’elles-mêmes si elles ont un teint de peau plus clair.

Verma, S.B. 2010. “Obsession with Light Skin: Shedding some Light on Use of Skin
       Lightening Products in India.” International Journal of Dermatology, 49(4): 464-465.
Quand nous entendons parler d’éclaircissement de la peau, nous pensons souvent aux femmes d’origine africaine, mais cet article traite des femmes indiennes. Il explore ce que cela signifie d’avoir une peau claire plutôt que foncée et mentionne également l’industrie des produits éclaircissants en Inde. L’article stipule que les médias pourraient être une des raisons qui conduit les femmes à la peau foncée à se dépigmenter. Il critique également la façon dont les grandes entreprises utilisent la publicité pour faire circuler de fausses informations au sujet des produits éclaircissants.

3 Comments
Marie-France July 22nd, 2012

C’était très intéressant à lire. J’ai appris des choses. Cela m’a rappelé, quelque temps après que je sois arrivée au Sénégal, alors que j’achetais un flacon de lait Nivéa pour le corps au supermarché, une Sénégalaise pas très jeune, m’a abordée en me disant de faire attention parce que “le Nivea noicit la peau”. Personnellement, j’ai pensé que je ne craignais pas grand-chose… parce que ma peau est déjà très claire, ce qu’on appelle blanche.

Ndéye Khady Lo September 5th, 2012

Dépigmentation de la peau : un phénomène à la peau rocailleuse

Dans certains pays d’Afrique, avoir la peau claire reste un canon de beauté. Par complexe, des femmes et hommes noirs s’adonnent à la dépigmentation malgré les risques pour la santé. Xessal au Sénégal, Tcha-tcho au Mali, Ambi au Gabon, Akonti au Togo, Dorot au Niger ou encore Maquillage auCongo et au Cameroun… Des appellations qui en disent long sur un mal.
…L’éclaircissement de la peau connaît un essor inquiétant sur le continent. Une pratique ancrée dans les mentalités depuis le XVIIe siècle avec la colonisation. En ce temps, la peau noire était perçue comme une malédiction. Dans le but de les dominer, les colons ont inculqué aux noirs le complexe de la peau claire. Cette idée reçue est la cause de la dépigmentation.
http://www.keneya.net/?q=node/20

Kathryn Toure January 30th, 2013

Incroyables croyances ! Du roman “Merci l’Artiste” (pp. 180-81) par Isaïe Biton Koulibaly de la Côte d’Ivoire

…son maître… lui avait conseillé d’épouser une femme à la peau claire s’il voulait atteindre un jour le poste le plus important du pays.
– Petit frère, la femme claire apporte la chance. Avec elle, tout ce que tu entreprends te réussira. Il faut toujours éviter d’épouser une femme noire. Elle apporte la malchance dans le foyer. La femme claire c’est la bénédiction, le succès et le paradis.
– Je comprends pourquoi elles sont tant sollicitées.
– Et c’est la raison pour laquelle elles se jouent beaucoup des hommes. En outre, elles ont l’art de faire dépenser les hommes. A leur décharge, il faut reconnaître que leur peau a besoin de plus d’entretien à cause du soleil. La peau noire s’entretient plus facilement et elle est plus résistante. La femme claire a besoin de plus d’argent pour les produits de beauté afin d’entretenir sa peau. Ma femme, restée au pays, ma deuxième épouse car j’en ai quatre, est de peau noire. Je l’ai voulue ainsi afin qu’elle soit encore agréable à regarder quand elle aura soixante ans. A cet âge, la femme de peau claire est déjà fanée. Toi, je te conseille vivement de prendre une femme à peau très claire à cause de tes ambitions.